“Here’s to you Nicola and Bart,
Rest forever here in our hearts
The last and final moment is yours
The agony is your triumph.”
(Ennio Morricone/ Joan Baez, Sacco e Vanzetti, 1971)
On mouille la tête des prisonniers
Avec une éponge imbibée,
C’est un acte de merci, de charité :
C’est pour que le courant circule mieux.
Et ainsi l’eau dégouline,
Sur un front, sur une pauvre poitrine,
Qui ne vivront pas vieux.
Car les voila oints du sceau
De ceux qui vont mourir bientôt.
Dedans il pleut à grosses gouttes,
Il pleure sans larme, il pleure sans doute,
Il suinte la peur : c’est la toilette
Mortuaire avant l’heure.
C’est cette éponge de vinaigre romain,
Qu’on présenta au Christ en vain.
Oui, ce geste là est d’une cruauté
Qu’on ne dit pas. C’est le cri
Muet d’un corps à l’agonie,
C’est vous, Sacco et Vanzetti,
C’est pour vous, Sacco et Vanzetti !
Et puis il y a les sangles,
Cuir épais qui a déjà bien servi,
Dont les boucles implacables
Retiennent les sept douleurs.
Elles sont imbibées de la sueur
Qui vient aux portes de la mort,
Qui suinte des pores d’un mort.
Ces sangles de cuir que l’on boucle
Aux chevilles et aux poignets,
Et dont on sait,
Qu’on ne pourra les desserrer.
Parce que le corps gonfle
Quand le courant est passé.
Un corps bleui, enflé,
Comme celui d’un noyé,
Qui dérive dans le courant.
Et puis il y a la silhouette assise,
Impuissante et qui attend.
Les bras écartés, les épaules sises,
La cagoule noire en fait un corps
Sans visage, mais même cette
Forme inhumaine et sans tête,
Posée sur la vielle chaise de bois,
Elle fait pitié.
Même ce criminel sans pitié
Honni des hommes et des lois,
Sanglé à la vielle chaise de bois,
Il fait pitié.
Et s’il était innocent ?
Qu’adviendra-il de son sang ?
Les enfants c’est l’heure du bain,
Le courant circule bien.