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10 mars 2010 3 10 /03 /mars /2010 15:24

 

 

expo trash 1

Poubelle de star de l'exposition Trash

 


Il y en a partout : sur la table, sur les sièges, par terre… Des miettes et des serviettes sales qui baignent dans du café et du milk-shake renversés, des gâteaux à moitié finis, des emballages et autres des déchets non-identifiés… C’est beaucoup pour une seule table. La première réaction de toute personne saine d’esprit n’ayant pas été élevée sur un tas de fumier : « Dégueulasse, on est chez les porcs ». On ne parle même pas d’éducation ou de savoir-vivre, c’est au-delà de ça. Cela doit être dans un endroit au fin fond de la galaxie, où les gens ont des excuses pour ne plus faire attention à leur environnement. Bienvenue au pays de Jabba the Hutt ! Que diriez-vous si je vous disais que je viens de décrire un coin du Starbucks d’un « excellent » quartier de Paris (du moins à en juger par le prix au mètre carré) ?


Spoerri faisait bien des « œuvres » avec les reliefs de son déjeuner… Et puis, il y a eu cette exposition, justement nommée « Trash », qui nous présentait le contenu des poubelles des stars [1]. L’occasion rêvée d’apprendre que Madonna boit de la Volvic, tandis que Sharon Stone préfère l’Evian. Je me suis dit que l’on aurait pu faire une œuvre de la saleté du Starbucks, on aurait pu appeler ça « dégueulis d’une petite fille riche », « 18 ans que maman ramasse derrière son fi-fils adoré », ou encore «aimez-moi pour ce que je suis vraiment»…


Parce que, contrairement à ce que l’on pourrait croire, il y a un grand raffinement dans toute cette saleté. C’est une saleté qui proclame bien haut et fort : à la maison, j’ai une femme de ménage qui passe derrière moi. Je pars en vacances dans des endroits exotiques et je skie au moins deux ou trois fois par an. J’essaye de partir avec mes potes, parce que les parents c’est lourd ! J’aime pas trop le lycée, je ne sais pas trop ce que je vais faire plus tard, mais il faut que ça gagne. Je vais tenter un BTS info-gestion. Mon activité favorite est de « me mettre une race » (toujours avec des potes, je suis un animal social, Aristote à donf !). Je porte une doudoune à la mode avec la capuche bordée de fourrure et un jeans moulant et des bottes, de préférence des Ugly boots, ou des Converses… Malheureusement pour les employés qui ramassent derrière ces gens-là, la saleté, fusse-t-elle dorée, reste de la saleté (heureusement que la saleté du Starbucks, c’est comme l’argent, ça n’a pas d’odeur).


Les gens révèlent ce qu’ils sont dans les « activités primaires », ce qui se rapporte à la nourriture ou au sexe en fait partie. C’est là que vous voyez tomber le masque, et que vous voyez à quel point certains sont, quelque puisse-t-être leur éducation de par ailleurs, des porcs. Je me souviens de cette remarque de mon amie Nathalie concernant un certain cadre dynamique, qui avait comme on dit: « un très bon relationnel »  et « un bon réseau » : « Oui, mais je n’aime pas sa façon de se jeter sur la nourriture dès qu’il y a un buffet». Voila, c’est dit.


Les apparences, tout n’est qu’apparence… Mais si on sait y regarder, il y a quand même toujours quelque chose qui transparait de la réalité intérieure. Il y a des gens qui ont de l’allure, de l’élégance, de la grâce, rien n’y fait, cela s’attache à leurs gestes, à leur façon de parler, à leur façon d’être. Et puis il y a les autres, ceux qui sont naturellement sales et vulgaires, et cela aussi, cela ressortira toujours. Il y a des gens qui auront de l’allure même en faisant le ménage, d’autres qui auront finalement toujours l’air de sortir de l’égout, même en buvant une coupe du meilleur champagne qui soit…


Et encore une fois, cela n’a pas ou si peu à voir avec l’éducation. L’éducation donne un vernis, elle s’acharne à redresser ce qui est déjà tordu, mais il ne faut pas se faire trop d’illusions. Je fais le parallèle avec le talent artistique, car il y a comme un art de se tenir. Il suffit d’assister à un cours de danse classique, il y a celles qui ont la grâce et les autres. Il suffit de lire un paquet de lettres de motivation, il y a ceux qui ont du style et les autres. Il suffit ‘écouter les gens jouer d’un instrument, il y a ceux qui font des notes et ceux qui font de la musique… Evidemment, on peut s’améliorer, se corriger, gommer les défauts rédhibitoires, c’est mieux que rien, mais c’est laborieux. Et bien oui, il y a les gens de qualité, et les autres. La qualité, c’est de naissance, et cela naît où cela veut (pas au pays de Jabba the Hutt en tout cas)…


 

[1] Exposition qui avait eu lieu à la Maison Européenne de la Photographie en 2007. Bruno Mouron et Pascal Rostain, les paparazzis reconvertis en artistes-ethnologues, avaient fait les poubelles des stars et en avaient présenté le contenu soigneusement trié sur de grands panneaux noirs.

 


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8 mars 2010 1 08 /03 /mars /2010 16:33



Elle fume pas, elle boit pas, elle drague pas, mais... elle cause!

(Audiard, 1969) Bande-annonce.

 


Je dispose d’une petite heure et je décide d’aller prendre un bon café au Starbucks. Vu l’heure et le quartier, je sais que j’ai de fortes chances  de tomber sur une bande de fils et filles à papa. Le genre de bande constituée de trois à quatre petits monstres d’égoïsme des deux sexes, qui braillent en exhibant leur iphone, entre deux gorgées de la dernière boisson à la mode. Mais, je prends le risque : j’aurais peut-être la bonne surprise de pouvoir déguster mon café et lire en paix. Pourquoi devrais-je toujours avoir raison ? Et puis pourquoi ces bandes devraient-elles être antipathiques ? Les gens n’ont-ils pas le droit de s’amuser ?

Je m’assieds à une table les deux tables à côté sont inoccupées : c’est bien parti. Je devrais être optimiste plus souvent, cela me réussit. A peine ais-je pensé cela qu’une flopée de quatre étudiants viennent occuper les tables libres. De parfaits spécimens, on n’aurait pas pu rêver mieux. Trois filles et deux garçons. Je vois très bien le genre, trop bien même, mais je décide de rester un peu. Une fille commence à prendre la chaise en face de moi, sans s’excuser, normal. Le garçon lui dit : « Ben demande avant ». Tiens, ses parents auraient-ils tenté un semblant d’éducation ? Etonnant. J’ai une pensée émue pour eux. La fille, quant-à elle, s’exécute, mais manifestement ce genre de finasserie lui passe à dix mille pieds de la tête.

Ils commencent à parler, je continue à lire. Ils parlent de leurs cours de comptabilité, ça a l’air très très dur. C’est certain que pour réussir en comptabilité, il faut être très très intelligent… La fille à la chaise est « d-é-g-o-û-t-é-e », pourquoi ? « J’ai fait le partiel de 2006, celui de 2007, celui de 2008 et celui de 2009. Je savais tous les refaire et aussi les interros de cours et je me tape 6/20. Non mais trop dégoûtée !» Bien, donc, en somme, tu viens de dire à tes amis « Je suis tellement conne que même quand je travaille comme une folle, j’arrive encore à me taper 6/20 ». J’avoue que j’aurais évité : je n’aurais pas mentionné le travail acharné ou pas le 6/20, pas les deux dans la même phrase en tout cas…  Elle est très honnête cette fille en fait, j’admire. Les amis se taisent un très bref instant, il y a comme l’ombre d’un silence gêné. C’est très fugace, mais c’est bien là. Quand même ! Les amis réalisent, mais ils ne relèvent pas. Du reste, la fille à la chaise est le pilier du groupe, elle anime la conversation, elle a toujours quelque chose à dire, toujours quelque chose à rajouter. Difficile de lire avec une personne aussi… dynamiquement creuse qui résonne à deux pas de soi.

Cela me fait revenir quelques années en arrière, j’ai un nom en tête : Anne-Laure. Cette Anne-Laure, je l’ai croisée dans mes études, c’était une miss-rallye qui avait atterri en prépa et qui tentait, entre deux soirées, de travailler tant bien que mal. Pas une lumière sans être excessivement stupide, assez expansive et bavarde à souhait. Je n’avais rien contre elle, sauf peut-être son attitude légèrement condescendante à l’égard de la personne « trop sérieuse » que j’étais, mais j’avais des co-préparationnaires qui lui étaient ouvertement hostiles. Un jour, alors que, pour la n-ième fois, ils me répétaient que, quand on est « comme elle », on ne devrait pas se payer le luxe d’être aussi expansive, je leur fis remarquer qu’elle avait tout de même réussi à entrer dans notre prépa et que par conséquent son intelligence… Mon ami Maxime m’arrêta tout de suite : « Je ne sais pas si le mot ‘intelligence’ convient dans son cas », tout était dit. J’aimais bien ce Maxime.

Retour au XXIème siècle. Le groupe se met à parler « TOC », Troubles Obsessionnels Compulsifs. Classique, ils ont sûrement une professeure qui a un TOC, quelqu’un qu’ils peuvent détester à loisir. Ils vont énumérer les autres « cas » dans leurs connaissances, puis ils vont tenter de « conceptualiser ». Manifestement, ils ont des idées confuses sur le sujet. La fille de la chaise évoque le syndrome Gilles de la Tourette. Pas mal, elle arrive à sortir le nom sans se tromper. Mais voila qu’elle se pique de vouloir imiter les effets du dit syndrome. D’une voix rauque, et vide à faire honte à un déficient mental,  elle hurle, ou plutôt elle éructe, un consternant : « pauvre con ! » Dire que j’apprécie beaucoup ce genre d’agression sonore est encore un euphémisme. Elle ne sait pas qu’elle vient d’échapper à une brûlure intégrale du visage au  café bouillant. Elle recommence, une fois, deux fois, non, trois fois. Le garçon l’interrompt, il est vaguement gêné. Elle recommence encore. Elle ressemble au mauvais garçon de Pinocchio juste après sa transformation en âne : elle brait littéralement. Elle fume pas, elle boit pas, elle drague pas, mais ... elle brait! [1], un film d’Audiard (Michel, parce que Jacques on en parle assez en ce moment).

Je me perds dans mes pensées… Consternation. Si ces gens là existent, s’ils sont la majorité… Ce n’est pas juste un petit moment de délire entre amis. C’est un lieu public ici, il y a des gens qui travaillent. Plus tard elle aura un métier, elle aura un master, quoique, vu ses notes c’est mal parti. Ces gens-là ont des parents… ces gens-là auront des enfants. Ils vivent leur petite vie, ils vont aux soirées… C’est ainsi qu’il faudrait que je sois, il faudrait que je me moque de tout, que je me contente d’étaler ma « personnalité », si pauvre soit-elle, à la face du monde… Il faudrait que je m’en fiche. Comme elle. Quand même, elle contredit ma théorie que les gens sont haïssables en foule et plus supportables pris individuellement. Elle tourne sur elle-même, elle se fiche de son environnement, pire, elle le méprise. Elle n’est pas juste abyssalement stupide, elle est abyssalement égoïste. Elle tuerait avec le sourire, comma ça, sans rendre compte : « Ben quoi ? J’ai pas fait exprès ! ». Ces gens-là sont dangereux, ce sont les personnes à stupidité contondante, ils ne tranchent pas, ils ne sont pas incisifs, ils tuent par contondance, par leur bêtise, par leur ignorance, par leur lourdeur… Je ressors de mes pensées. Un peu de café. La prochaine fois, je ne resterai pas. Je retourne à mon livre. Qu’est-ce que je lisais au fait ? Un si fragile vernis d’humanité, Banalité du mal, banalité du bien [2]

[1] Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas, mais elle cause film d'Audiard de 1969, avec l’excellente Annie Girardot

[2] Terestchenko, Michel, Un si fragile vernis d’humanité, Banalité du Mal, banalité du Bien, La Découverte, 2005.

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7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 14:45

 

 

 

Bizet, L'Arlésienne, Suite No.2, Menuet et Fanrandole

 

 

Un salon de thé sur la place du Trocadéro. Je dois y retrouver mon ami S. pour le petit-déjeuner. J’arrive dix minutes en retard, il me prévient qu’il est encore plus en retard que moi. Je rentre donc et je demande une table pour deux. On me fait traverser une salle déjà bien remplie et on m’installe à une de ces tables si ridiculement petites qu’elles n’incitent guère à la consommation : à peine la place d’y poser une théière, inutile de penser à la croissanterie. Je commande un expresso. Je sais bien que, quand il arrivera, mon ami S. commandera ladite croissanterie et que la table sera envahie. Je laisse donc ma tasse de café profiter de cette solitude assumée. L’espace est un luxe de nos jours, n’est-ce pas ?

J’ai pris place comme à mon habitude sur la banquette et non sur la chaise, de sorte que j’ai une vue dégagée sur tout le salon. Immédiatement à ma gauche se trouvent deux autres tables. A la première, il y a un homme et une femme d’une soixantaine d’années. Je les ais obligés à déplacer quelque peu leurs affaires quand j’ai pris place sur la banquette, ce qu’ils ont fait de manière assez aimable. L’homme porte un pardessus assez ordinaire, la femme un manteau de fourrure d’une certaine qualité. A la table d’après se trouvent un homme  du même âge et une femme plus jeune. Je lui donne environ trente-cinq ans. Elle a les traits assez fins et typés, elle est blonde. Elle est habillée en bourgeoise, mais en bourgeoise active, pas le genre qui élève les enfants à la maison. Elle à l’habitude de sortir. Elle a l’habitude du contact humain. Elle sait communiquer, elle a une certaine présence, une prestance, profession libérale je dirais. Une certaine intelligence aussi à première vue, de celle qui consiste à savoir manier des éléments au sein d’un modèle, et puis une véritable assurance… J’ai en tête une vague idée de Marine Le Pen, mon inconnue serait-elle avocate ?

Conversation. Le premier couple, ce sont des amis, des commerçants du Sentier qui parlent plus ou moins affaires, rien de bien passionnant. Le second couple s’avère être un père et sa fille. La fille est avocate, bonne intuition donc. Ils parlent affaires également, affaires juridiques pour être exacte : le parquet vient de faire appel de la décision de justice concernant l’affaire Clearstream. Et puis voila que les deux femmes se lèvent, à quelques secondes d’intervalle, pour se rendre aux toilettes. Et là une chose intéressante se produit. Le commerçant s’adresse au père de l’avocate : « Monsieur, je vous connais… » Enumération d’amis et de connaissances, les deux hommes se connaissent en effet. Et de quoi parle-t-on ? Du Sentier. On parle affaires, et bien évidemment, le monsieur du Sentier peut arranger des affaires intéressantes pour l’autre monsieur. Mais cela ne tombe pas dans l’excès, c’est habilement amené, pas trop appuyé. L’avocate revient des toilettes. On se présente, et on se serre la main.

« Ma fille qui est avocate. »

« Ah ! c’est bien ça. Et vous ne connaîtriez pas V.H. par hasard ? »

« J’ai eu une belle sœur qui était amie avec sa femme. J’ai été mariée pendant plusieurs années à J.B. en fait. »

Tout ceci sur un ton parfaitement libéré et décomplexé. Comme s’il s’était agit d’une joint venture: on a été en affaire, rupture du contrat et c’est fini. Je gage que le divorce de la jolie avocate est passé comme une lettre à la poste. La dame du sentier revient à son tour des toilettes.

 « Tiens Ginette, voici monsieur M. On se connaît. Et sa fille qui est avocate. »

« Moi aussi je connais le monsieur, c’est ce que je me disais depuis tout à l’heure. »

« Ah oui ? »

« Oui, tout à fait. Votre femme est venue acheter du tissu chez moi. Mais vous ne me connaissez pas. C’est ce que je dis toujours : je connais tout le monde et personne ne me connaît. »

« Ah mais comment cela se fait? »

« J’ai beaucoup travaillé au magasin, je m’occupais des comptes, j’arrivais le matin, je repartais le soir et je ne voyais personne. Mais, j’entendais parler de tout le monde. C’est ce que je dis toujours: je suis l’Arlésienne du Sentier. »

Jolie formule, je salue intérieurement, et me demande depuis combien d’années elle l’utilise ? J’entends la suite de Bizet, c’est un air entêtant, l’air d’un chant de noël, La Marche des rois, « De bon matin, j’ai rencontré le train de trois grands rois… ». C’est certain, le sentier aurait pu habiller le cortège des rois mages, comme un Rothschild peut boire un verre de Lacrima Christi. Puis je repense à Alfonse Daudet, aux Lettres de mon moulin que me lisait mon père… C’est alors qu’arrive Benjamin, grand et jeune garçon brun. Force d’effusion avec l’Arlésienne du Sentier, sa tante probablement. On refait les présentations. On rapproche les tables, on amène un siège pour Benjamin.

Entre temps, bien sûr, mon ami S. est arrivé. Nous avons eu le temps de petit-déjeuner, et de parler, de son travail pour l’essentiel, S. était fort préoccupé ce jour-là. Il ne faudrait pas croire que je n’ai prêté à notre conversation qu’une attention distraite : c’est aux tables d’à côté que j’ai prêté une attention distraite. Mais je ne peux m’empêcher de voir, d’entendre, de noter, l’air de rien. S me dit qu’il veut sortir, je ne m’oppose pas. Je ne m’oppose jamais pour ce genre de choses. Je quitte donc le sentier. Je me glisse dans le faible espace qui sépare nos tables. L’hôtesse du salon de thé me dit : « Vous avez vu, il faut vraiment être mince ici !» Et oui, l’espace est un luxe de nos jours, même physiquement on ne peut pas se permettre d’occuper trop de place.

 

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20 janvier 2010 3 20 /01 /janvier /2010 21:51


 

starbucks-cup.jpg

 

 

Du Starbucks on peut dire que c’est le McDonald’s du café, avec des prix qui auraient été doublés, voire triplés.  Outre-manche on trouve un Starbucks à chaque coin de rue, immédiatement suivi d’un Costa et d’un Nero, les chaînes concurrentes. A Paris, Starbucks est roi, il ne le dispute qu’aux cafés traditionnels. On ne trouvera pas de nostalgie du café traditionnel chez moi, j’aime l’anonymat relatif du Starbucks. Je n’ai jamais trouvé attirants les cafés enfumés d’avant la loi Evin, qui alignaient les habitués au comptoir et les torchons plus ou moins propres du patron.


Starbucks est donc le dernier lieu où l’on cause. On y rencontre des cadres qui, quand ils ne tapent pas frénétiquement sur le clavier de leur PC ou de leur Mac, téléphonent fièrement avec leur I Phone ou leur Blackberry. En général, leur anglais de cadre dynamique sonne tellement faux que j’en ai mal pour eux (enfin, j’exagère, il y a parfois d’authentiques Anglais au Starbucks). Ils viennent aussi en groupe faire leurs réunions de travail. Ce qui est bien, c'est qu'à la fin, on a toujours droit à une critique en règle des collègues absents. Il y en a qui font vraiment du Starbucks une annexe de leur bureau, voire carrément leur bureau principal, du moins à en juger par la nature des appels téléphoniques passés. Des travailleurs indépendants en tout genre viennent donner des cours de langues, faire du coaching ou même un casting pour un documentaire. Des touristes y  voient un repère familier, on les reconnaît à leurs sacs-à-dos, appareils photos et chaussures de marche. Des Américaines expatriées s’y retrouvent entre copines. Elles ont tendance à parler fort et à rire beaucoup. Question de culture, on parle fort quand on a été élevé à coup d'"express yourself". Quoique, les groupes de lycéens bien français que l’on y retrouve systématiquement savent aussi se montrer particulièrement expansifs.


Grande discussion dans la queue pour passer commande, les femmes (quelques fois les hommes) se demandent si elles vont prendre une part de gâteau ou se contenter d’une boisson. Moralité, elles repartent souvent avec la solution intermédiaire : boisson lactée et autre café macchiato bien sucré. Diététiquement parlant, je me demande si c’est le bon choix. Enfin, sinon, il y a les gâteaux, comme en Angleterre, comme en Allemagne, comme dans le monde entier, la gamme de produit est, à quelques variations près, standardisée. Il y a les muffins traditionnels, le carrot cake, les cheese-cakes, les pancakes…  Petite nuance observée aux alentours de Saint Michel, le Starbucks vend aussi de la croissanterie. C’est logique, les touristes du quartier ne veulent pas manger ce qu’ils ont l’habitude de manger à la maison, ils veulent du français, et le français, c’est la croissanterie. Ce qui est remarquable, c’est que les gérants l’aient compris et qu’ils puissent se permettre de rajouter un produit à la gamme habituelle (juridiquement parlant, tout dépend des clauses du contrat de franchise).


La grande mode : « customiser ». C'est à dire faire personnaliser sa boisson, moyennant un petit supplément qui peut facilement représenter 15% du prix d'origine. Caramel, chocolat, crème? Dommage les amis : je n’aime que le café noir. J’ai du m’accommoder un temps du « white tea » et du « white coffee » pour faire plaisir à mes amis anglais, mais de retour en France, c’est « black coffee » (le titre d’une bien jolie chanson jazz d’ailleurs). Heureusement que tous les clients ne sont pas comme moi.



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8 août 2009 6 08 /08 /août /2009 13:13







A mon ami Gustave, en toute amitié





Gustave de V. milite activement pour le rétablissement du duel d’honneur. Je précise qu’il organise aussi des duels avec ses virils amis, avis aux intéressés. Découvrons-donc  ses brillants arguments pour nous convaincre que tout homme qui se respecte devrait le soutenir.

 

 

« Pour ce que le combat singulier, d'homme à homme, a d'héroïque,

 

Cela commence bien, avec panache et style. Juste un peu poussiéreux peut-être : les mœurs se relâchent mon petit Gustave, tu peux aussi retrouver tes amis d’homme à homme dans un lit pour ce que cela a d’érotique.


Pour ce que le conformisme, la lâcheté et la couardise ont de méprisable,

 

On pourrait peut-être rassembler les « lâches », les « couards » et les « conformes » et s’en occuper à la Pol Pot, comme cela, il ne resterait plus que le vivier des hommes d’honneur. Seulement il faut bien des « méprisables » pour fabriquer nos épées…


Pour ce que le panache se raréfie,

 

J’ai d’ailleurs rejoint le comité de défense du casoar.


Pour ce que le combat, le danger et la souffrance forgent un homme plus sûrement que les boîtes de nuit, le consumérisme et le renoncement,

 

Consumérisme et renoncement, super market shopper et moine ascétique : même (non-)combat ! Remarquez, pourquoi pas, faisons sortir ces « renonçants » de leurs couvents et qu’ils se battent ! Mais, je suis très mauvaise langue, tu voulais parler de ceux qui renoncent à se battre et à promouvoir leurs idées.  C’est quand même ce qui s’appelle se tirer une balle dans le pied… Et puisque tu es pour le rétablissement du duel au pistolet, je te souhaite bon courage, mais je ne m’inquiète pas trop, comme tu le dis si bien, la souffrance forge un homme!

 

La plupart des gens se battent nolens volens au cours d’une guerre, pour éviter à leurs enfants plus tard d’avoir à le faire. Quelle erreur ! Il faut leur souhaiter beaucoup de guerres ! « Le combat, le danger et la souffrance», voila ce qu’il faut pour façonner un homme. Il suffit de faire la queue devant chez le prothésiste avec un vétéran d’Irak pour le constater. Etrangement, ces vétérans ne sont pas reconnaissants et disent de temps en temps à leur psychiatre qu’ils ont du mal à être des hommes avec quelques membres en moins… Ils n’ont manifestement pas compris l’honneur et la chance qu’ils ont eus.


Pour ce que le mépris de la mort a de noble et de grandiose,

 

Laissons ici la parole à un homme qui savait de quoi il parlait, j’ai nommé Antoine de Saint-Exupéry : « On vante [le] mépris de la mort. Je me moque bien du mépris de la mort. S'il ne tire pas ses racines d'une responsabilité acceptée, il n'est que signe de pauvreté ou d'excès de jeunesse». Je t’assure, Gustave, que son livre, Terre des hommes, est assez viril pour toi.

Pour ce qu'un homme mettant sa vie en jeu est d'autant plus grand que le prétexte en est petit,

 

C’est clair, je dis d’ailleurs : quand on a une bonne raison de mettre sa vie en jeu, attendons-en une mauvaise, ce sera plus noble !

Seulement, je me permets ici un petit rappel technique : il faut songer à cette loi stupide qui punit la « non-assistance » à personne en danger. En effet, si je vois un enfant qui se noie, pourquoi me précipiter à risquer ma vie? Dans quelques minutes, quelqu’un oubliera de me tenir la porte et j’aurai là le duel du siècle !


Pour ce que, du combat d'Achille triomphant d'Hector à Cyrano de Bergerac ridiculisant le vicomte de Valvert, les plus grands héros de littérature et de poésie étaient fameux duellistes,

Pour les traits d'esprits à ces occasions (Sainte-Beuve gardant son parapluie, disant qu'il voulait bien être tué, mais pas mouillé),

 

Comme c'est épique cher Gustave! Et comme c'est vrai, d’ailleurs d’Hamlet à Othello, les plus grands héros de la littérature et de la poésie sont de fameux suicidés. Et quelles belles déclarations ils ont faites à l’occasion ! Vive le suicide et les traits d’esprits prononcés à ses occasions (dommage qu’il y ait en général peu de personnes pour les entendre)!


Pour ce qu'un bon coup d'épée ferait gagner du temps que l'on perd à tenter d'expliquer les choses aux médiocres et aux bornés,

 

Encore une fois, c’est limpide, tu as bien raison. Tu mets ainsi tes pas dans ceux des grands hommes de l’histoire : les membres du Comité de Salut Public, Lénine, Staline, Hitler, Pol Pot... Seulement, il n’y a pas qu’un bon coup d’épée pour cela, tu conviendras avec moi qu’une bonne chambre à gaz est plus efficace. Mais, tu es de la vieille école, tu veux avoir le plaisir et l’honneur de les passer un par uns au fil de l’épée. Attention quand même à ne pas trop salir ton habit, ta maman aura bien du travail sinon, la pauvre.


Pour ce que cela nous permettrait d'occire de sujets de la perfide Albion sans avoir maille à partir avec la justice,

 

Ca y est ! Tu as réussi caser « la perfide Albion », pour un peu tu serais presque poète.


Pour ce qu'à vivre pour rien, il est préférable de mourir pour quelque chose, 

 

Exactement. Je pense qu’on devrait écrire cela au fronton de toutes les unités de soins palliatifs. Ce serait particulièrement pertinent au département pédiatrie, il faut instruire les enfants !

Parce que feu Volkoff faisait partie de l'association pour le rétablissement du duel,
Parce que Bernard Lugan en fait toujours partie,


Nous souhaitons et espérons le rétablissement du duel d'honneur dans la législation française, qu'il soit à l'épée ou au pistolet. »

 

Et bien je suis pour ! Comme cela tous les gens « d’honneur » feront la preuve de leur courage et de leur abnégation. Non seulement ils risqueront, mais ils perdront leur vie. Et il n’y aura que ce pleurnichard de Saint-Exupéry qui ressentira « en face de cette triste parade une impression non de noblesse, mais de misère ».

 

Si après cela vous n’êtes pas convaincus que Gustave est un homme d’honneur, qui a une grande expérience de la souffrance, qui respecte la vie humaine et se souvient que tout le monde n’a pas la chance de pouvoir jouer sa vie sur un petit prétexte, c’est que vous méritez qu’il vous passe au fil de l’épée !

 


Signé: Le Chapelier fou

 

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L'orange Maltaise

  • : L'orange maltaise
  • : « Il pourrait se trouver, parmi [mes lecteurs] quelqu’un de plus ingénieux ou de plus indulgent, qui prendra en me lisant ma défense contre moi-même. C’est à ce lecteur bienveillant, inconnu et peut-être introuvable, que j’offre le travail que je vais entreprendre. Je lui confie ma cause ; je le remercie d’avance de se charger de la défendre ; elle pourra paraître mauvaise à bien du monde ! » (Mémoires de la Duchesse de Dino, 1831)
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